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AMOUR NOYÉ DANS LES MÉTROS

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 AMOUR NOYÉ DANS LES MÉTROS

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AMOUR NOYÉ DANS LES MÉTROS EmptySam 18 Juin - 19:47

yousra amara
il est loin le temps des amours, le temps des cœurs qui se serrent.
damien saez, @money honey.
prénom(s): yousra.
nom: amara.
âge: seize ans.
date/lieu de naissance: trois avril jspjspjsp.
origine(s): algérienne.
étude(s)/emploi(s): lycée.
situation civile: célibataire, mariée à ses bouquins, aux amants désunis, et puis à l'algérie.
situation familiale: aînée, elle a deux petites sœurs qui sont jumelles et un petit frère.
situation financière: ça s'démerde.
réputation au lycée: une salope vierge dont les lèvres n'ont touché que les joues.
avatar et crédit: nicole zimmermann, @money honey.
yousra est sur le bateau. elle regarde les vagues s'échouer, lentement, contre la coque. l'eau est un petit peu sale, mais l'écume camoufle sa couleur brunâtre. elle replace, sur ses épaules, les deux couettes que papa lui a fait ce matin. ça fait un peu mal quand papa la coiffe, mais ça n'arrive pas souvent. peut-être un peu plus depuis que maman est partie. ses gestes sont brusques, ses mains anguleuses. ses doigts sont râpeux et ses phalanges pointues, mais yousra est tout de même contente de cette proximité, parce que papa, souvent, il est absent. il travaille beaucoup, papa, et il rentre tard le soir. il ne parle pas beaucoup, il ne la sert pas beaucoup dans ses bras, et à yousra, ça lui manque un petit peu, parfois. elle lève ses yeux vers le ciel vraiment bleu et se demande si, là où elle va, le ciel aura la même couleur. elle inspire très fort puis se demande aussi quelle saveur, quelle odeur a l'air en france. ici, comme ils sont encore près des côtes d'alger, elle peut presque sentir le parfum singulier des épices mêlé à celui du poisson pêché la veille, dans ces eaux un peu sombres. quand elle allait au marché avec maman, yousra se bouchait le nez pour faire comme les autres enfants. mais maintenant qu'elle part vers l'inconnu, vers l'au-delà très loin d'ici, son cœur est un petit peu fendu. il y a un tout petit morceau qui s'en est échappé, dans l'air salé. un tout petit morceau d'algérie, où se mêlaient les odeurs de lila sur le cou de maman, et les odeurs des rues. avant de partir, elle clignait des yeux à chaque fois qu'elle voyait quelque chose qu'elle aimait, en pensant pouvoir le graver dans sa mémoire à jamais : le chat du voisin, d'abord. l'horizon vu du bord du port, qui était beau, car on voyait au loin les bateaux clignoter comme les grandes métropoles sur les images qu'elle a vues, autrefois. les femmes dont on ne distinguait presque que les yeux, mais qui avaient de jolis haïks. les étales, au marché, les étales colorées aux odeurs d'ici et aux odeurs d'ailleurs. peut-être y avait-il un peu d'odeurs de france ? elle avait pourtant beau tenter de s'imaginer quelle odeur elle avait, cette france dont beaucoup parlaient, elle n'y parvenait pas. il n'y avait que quelque chose de fade et de morne qui lui venait à l'esprit, quelque chose qui ne venait pas d'algérie. ici, l'air était poussiéreux, salé, et les effluves de nourritures y valsaient. mais là-bas, elle s'était imaginé qu'il n'y aurait que les odeurs amères des bâtiments très gris. des odeurs pas comme ici. elle baisse les yeux sur ses chaussures et se souvient des sols qu'elles ont foulés. en algérie, maintenant qu'elle était sur ce bateau immense, même les sols lui semblaient être les plus beaux trésors, des trésors lointains, des trésors d'avant. elle se souvient aussi, yousra, de l'appartement qu'elle a quitté ce matin. de la chambre qu'elle partageait avec ses deux petites sœurs, puisqu'elle était la plus grande. son frère, lui, avait sa chambre à lui, avec des petites voitures vertes. leur chambre à elles était orange pâle, et du parquet abimé qui mettait souvent des échardes dans les pieds était installé au sol. il y avait deux petits lits et un matelas : yousra occupait le matelas, qui était très collé au mur, car ses sœurs avaient peur qu'un monstre rampe sur le sol pour les dévorer, si elles y dormaient. yousra avait bien tenté de leur expliquer que les monstres savaient aussi marcher, mais au fond, elle était heureuse que ses sœurs connaissent ne serait-ce qu'un peu plus de confort qu'elle. elle était souvent heureuse, lorsqu'il s'agissait des ses sœurs. en quittant sa chambre, le matin-même, elle n'avait pas pleuré. elle n'aurait pas pu, car ses larmes et ses sanglots, ainsi que sa tristesse de quitter le pays dans lequel elle avait vécu ces neufs dernières années, étaient restés bloqués dans un coin de son cœur, de sa cage thoracique. maintenant qu'elle était sur ce gros navire, comme dans les livres d'images dans les jolis magasins d'alger, elle aurait bien voulu se rouler en boule comme une enfant de trois ans et pleurer à gros sanglots, jusqu'à ce que ses yeux soient desséchés, si jamais cela était possible. car il lui semblait que cette peine resterait gravée dans son âme toute sa vie, et toute sa mort aussi, même si on lui avait déjà dit que la mort mettait fin à tous les malheurs et toutes les peines, à tous les coeurs en pleurs. ce malheur-là, celui de quitter l'endroit qu'elle connaissait si bien et dont elle aimait caresser les murs du bout de ses fins doigts, lui semblait, oui, insurmontable. mais, elle se l'était promis : elle ne pleurerait pas. pour ses sœurs, pour son frère, pour papa, et pour le souvenir de maman qui se noierait dans ses larmes salées. et, ce souvenir-là, elle ne voulait pas le perdre. elle espérait, en tout cas, que là où elle était, maman n'était elle pas en peine. quelque part, en tout cas, elle était confiante. car papa lui avait promis que là-bas, ils seraient mieux. il leur avait promis qu'il gagnerait de l'argent, plus qu'à alger, et qu'ils auraient un bel appartement. elle yousra a décidé qu'elle le croyait, qu'elle lui faisait confiance, même s'il avait souvent été absent quand maman était encore là (parce qu'il travaillait, très tôt jusqu'à très tard le soir, sur les bateaux). elle avait surtout envie d'y croire, plus par besoin que par réelle confiance. non, elle ne voulait pas, elle, éprouver une confiance entière envers un homme, son père, étant presque, pour elle, un inconnu.  elle voulait juste avoir un futur, connaitre un après. un après la maladie de maman, un après son enterrement, un après les larmes et le malheur dans lequel on étouffe et suffoque. et surtout, elle se disait que ses soeurs et son frère avaient droit d'être heureux, eux qui n'avaient jamais compris tout ce qui était arrivé en même temps. yousra, elle, avait compris la mort depuis longtemps. en voyant alger s'effacer au loin, elle se dit soudain qu'au moins, son petit frère, ses petites sœurs, auront la chance de connaitre papa un peu mieux, un peu mieux qu'elle ne le fait. qu'ils auront la chance, eux, d'être heureux, sans l'absence, sans la mort à porter sur leurs frêles épaules.  
elle ne voulait pas pleurer. ou bien, elle ne devait pas pleurer. car pleurer, elle en avait envie, de tout son petit coeur, jusqu'au fond de son âme, elle voulait sangloter, faire sortir tous ces sentiments, ces sentiments en trop pour une si jeune enfant. mais elle ne devait pas, donc les larmes restaient coincées derrière ses prunelles et ça lui brûlait les yeux. ça faisait mal, mais au moins, elle ne pleurait pas. le problème, c'était qu'il y avait toujours cette déception énorme qui calcinait son cœur. cette déception énorme qui était apparue dès qu'elle était arrivée au port de cette ville appelée marseille, avec sa famille. déjà, les gens les avaient regardés de travers, peut-être à cause de leurs vêtements un peu salis, ou de leur accent trop prononcé ? comme elle croisait tant de regards très peu courtois, yousra avait fini par baisser les yeux sur ses chaussures et à réciter, tout bas, une comptine que maman lui avait apprise, autrefois.
Ayeuli yel'ha wouliw
Eusse teur bââte
Imaw lanime
Madeur'name
Aya sââdime
Seuyeusseune
Ara yeuh'frahwoulime.

la chanson avait fini par s'évanouir dans l'air qui lui semblait, oui, sans saveur ni parfum. et elle était tombée, en fonçant dans une dame aux sourcils froncés et au front plissé. la dame avait des mots trop durs, et dans la précipitation et la peur, yousra s'était excusée, en arabe. très gênée et surtout très triste de ces visages méchants, elle était partie en courant. la décéption avait encore grandit, et avait subermergé son coeur et son âme, lorsqu'elle était arrivée devant leur immeuble. et même lorsqu'elle avait marché à travers les rues, lorsqu'elle s'était assise dans ce taxi, ou lorsqu'elle inspirait très fort sans jamais reconnaitre les odeurs d'alger. mais cela restait à l'immeuble que tous ses espoirs s'étaient effondrés sur ce sol gris et sale. et derrière elle, ses sœurs, son frère, son père, l'avait piétiné, puisqu'elle menait la marche. pourtant, elle avait souri. son cœur n'y était pas, il était même à des milliers de kilomètres de là, resté dans sa chambre d'algerie, mais elle avait souri, à papa, alia, dalia et hilal. car eux, étaient heureux. elle le voyait dans leurs yeux. et elle ne voulait pas gâcher ce bonheur, même si elle ne le partageait pas. ils étaient heureux de tout ce nouveau qui arrivait dans leur vie, ils étaient heureux car la france était à leurs yeux le dernier espoir d'avoir une vie correcte, d'oublier la précarité de leur vie passée et la pauvreté des gens de la rue, à alger. mais yousra le savait, yousra l'avait compris, ce pays n'était pas sien. là où les sa famille voyait des couleurs et des sourires, yousra ne voyait que tristesse et désespoir, ne voyait qu'un ciel sec qui, au moindre faux-pas, lui tomberait sur la tête. elle était entrée dans cet immeuble qui lui semblait si gris, en souriant mais en hurlant de l'intérieur. ramenez-moi à alger, ramenez-moi chez moi, redonnez moi ma vie d'avant, redonnez-moi maman. ici, je ne peux pas respirer, ici, je ne peux pas vivre. ici, je serai morte et continuerai pourtant de marcher. oui, ramenez-moi à la maison, redonnez-moi mon cœur et un sourire qui n'est pas faux. puis elle fermait les yeux très fort, ainsi que ses poings, en espérant se retrouver dans sa chambre aux couleurs orangées. quand elle les rouvrait, cependant, elle était encore là, sur ce sol fait de pierre ou d'elle ne savait pas quoi, dans ce couloir trop froid, et sa famille la regardait d'un œil soucieux. alors elle souriait un peu plus fort, mais dans son cœur, il pleuvait encore. mais ses pensées à elle pleuraient encore. - les murs de l'appartement étaient jaune. pas un joli jaune, pas le jaune du colza. un jaune fade qui rendaient les yeux de yousra encore plus sombres. yousra avait une chambre à elle toute seule, et ça ne lui plaisait pas. en plus, elle était toute petite, cette chambre là, et pas comme celle d'alger. en plus, c'était tout vide, mais papa leur précisa vite que les meubles allaient arriver. yousra, ça ne la rendait pas plus heureuse, au contraire. elle s'était habituée à dormir sur un matelas. les jumelles, elles, dormaient dans la même chambre, une chambre qui était plus grande et plus lumineuse que celle de yousra. elles avaient eu vite fait de courir partout et de prendre leurs marques. quant à hilal, il dormait dans la plus grande chambre car il avait toujours été le préféré de papa. car c'était un garçon, c'était comme ça. papa occuperait une petite pièce, à peine plus grande que la chambre de yousra. papa leur avait aussi dit qu'ils iraient à l'école en septembre prochain. yousra, elle ne savait pas quand est-ce que septembre arriverait, mais elle garda ses questions pour elle, car sa voix trahirait l'immense tristesse ainsi que la déception plus grande encore qu'elle avait, pour l'instant, réussi à dissimuler. la seule chose qui la rassurait, qui la rendait un petit peu heureuse, c'était qu'il y avait, ici aussi, la mer. un petit bout d'alger à marseille, elle trouvait ça joli. l'eau y était cependant plus bleue, et l'air moins salé, elle trouvait. mais ça lui allait tout de même, car elle était si triste qu'un rien la soulageait.
comme papa l'avait dit, elle était entrée à l'école publique française en septembre. l'été était passé avec une lenteur déconcertante, et avait plongé yousra dans une profonde mélancolie. son pays lui manquait, maman lui manquait, un peu plus chaque jour. elle avait passé ses journées enfermée dans sa chambre ou bien à marcher au bord des vagues, les vagues qui la rassuraient. lorsqu'elle fermait les yeux et se laissait emporter par la chanson de la mer, elle était de retour à alger. le temps d'un instant, parfois plus. mais se plonger ainsi dans les souvenirs lui faisait du bien, et elle se sentait un peu mieux à chaque fois. elle s'était même convaincue qu'à l'école, elle se ferait des amies. elle n'en avait pas beaucoup, en algérie. il y avait aziza, qui lui manquait elle aussi beaucoup, et wahiba, qu'elle appréciait un peu moins mais avec qui il était agréable de passer du temps. car wahiba, elle était gentille et qu'elle lui faisait oublier le temps qui passait et sa vie un petit peu triste, après la mort de maman. oui, elle s'en ferait d'autres en france, des amies comme ça. des amies qui ne se moquent pas de son accent un peu moins prononcé qu'à son arrivée mais qui est toujours bien là. yousra, elle avait toujours su s'exprimer dans un français fluide, mais cet accent lui collerait toujours à la peau, elle l'espérait. car quand elle parlait, elle pouvait entendre maman qui chantait tout bas au creux de son oreille, comme autrefois. elle était arrivée à l'école, lundi matin, habillée d'une jupe plissée, d'un chemisier et de sandales que papa lui avait acheté, en utilisant un petit peu l'argent qu'il avait réussi à gagner pendant l'été. les trois petits n'allaient pas à la même école, car ils n'étaient pas aussi grands que yousra, qui elle-même était encore petite. au début, tout le monde l'avait un peu dévisagée, et ça l'avait gênée. d'abord, elle avait voulu s'enfuir, mais c'était passé. elle avait une maîtresse qui était très gentille et qui s'appelait camille. camille, elle avait les cheveux très blonds, et elle était jolie. yousra n'avait pas l'habitude de voir des filles aux cheveux blonds, même s'il y avait beaucoup de filles aux cheveux comme-ça, ici. elle s'était aussi fait une amie, qui s'appelait nine. nine avait précisé que son prénom ne se prononçait pas comme le chiffre en anglais, mais yousra s'en fichait car le chiffre en anglais, elle ne le connaissait pas. nine a les cheveux couleur de jais et les sourcils épais. des tâches de rousseur parsèment son visage très pâle, et ses yeux sont bleus comme la mer ici, à marseille. nine, elle rit beaucoup et parle peu. nine, elle est très gentille, et elle rend yousra très heureuse, ce qui est pourtant devenu compliqué, depuis qu'elle n'est plus trop vivante, plus trop chez elle, depuis qu'il lui manque un bout de son coeur.
-
2016.
yousra se réveille, alors que le soleil filtre entre les rideaux bleus océans de sa petite chambre. il y a un bruit assourdissant qui lui brise les tympans, et c'est très désagréable. elle envoie valser sur le sol son portable, mais le son ne s'éteint pas. yousra grogne, comme elle le fait souvent. le dos courbé et les yeux petits, elle se lève lentement, ramasse son portable et éteint le réveil, lui annonçant le début de la routine quotidienne. elle sait déjà qu'elle n'allait plus réussir à se rendormir, maintenant qu'elle était debout. aujourd'hui, c'était lundi, et puis nine allait venir sonner dans exactement quarante sept minutes. quarante minutes, c'était beaucoup mais vraiment pas assez. car yousra devait se maquiller, pour masquer ses cernes et la mélancolie qui s'immisçait dans les plis de son visage. elle n'était pas malheureuse, yousra, mais il y avait toujours ce vide en elle, qui semblait être un poids en plus sur ses épaules et sur son coeur. il n'était pas parti, non, mais elle avait juste appris à le porter, à avancer avec malgré sa lourdeur et la tristesse qu'il provoquait en elle. ses pensées finissent par s'échapper, alors qu'elle secoue sa tête doucement. elle enfile des vêtements très moulants, trop moulants peut-être pour une fille de seize ans. mais papa ne disait jamais rien, alors elle continuait à les porter et à se maquiller comme un vulgaire pot de peinture, gâchant ainsi la si jolie couleur de sa peau. les gens faisaient comme ça, au lycée, alors elle aussi. elle essayait juste de se fondre de la masse, yousra, ce n'était pas un crime. elle n'était pas une salope, comme les garçons disaient parfois, elle le savait tout au fond d'elle, puisqu'elle n'avait jamais embrassé personne. mais ça, elle ne le disait pas aux autres, que à nine. elle sort de sa chambre, faisant claquer la porte de bois, sur laquelle étaient collés des photos, des dessins de ses petites sœurs. elle fait tomber un livre de son étagère, les amants désunis. un livre qu'elle aime tant, un livre qui parle d'alger, alger avant, il y a longtemps. elle ne se retourne pas pour le ramasser. elle entre dans la cuisine et puis comme d'habitude, prépare le petit déjeuner pour les jumelles et pour hilal. papa était déjà parti travailler depuis longtemps, comme souvent. la cuisine, elle la connaît par cœur, et ses gestes sont mécaniques. tout ça est devenu une vulgaire routine, une habitude monotone, tout comme la vie qu'elle mène. ensuite, elle va réveiller alia et dalia, qui avaient la veille décrété vouloir être appelées julie et léa, car cela sonnait bien plus français. yousra, elle qui faisait tout pour conserver bien en état le souvenir de son algérie natale et pour qui la simple chanson des vagues provoquait un amas de souvenir, en avait ri. elle trouvait ça ridicule, au fond, mais n'avait pas son mot à dire là-dessus. ses sœurs et son frère avaient moins de souvenirs de leur vie d'avant, contrairement à elle à qui cette vie là manquait affreusement. elle réveille aussi hilal, évidemment. puis elle s'enferme dans la salle de bain et se regarde longuement dans le miroir. et sourit, pour voir si elle n'a pas oublié comment faire pendant la nuit. elle a oublié beaucoup de choses, yousra, et elle ne voudrait pas oublier ça. ensuite, elle met du maquillage, elle en met beaucoup trop. elle finit par ressembler à une poupée de plastique et puis se trouve ridicule, mais hausse les épaules. papa ne lui interdit pas, elle a le droit. elle brosse ses longs cheveux bruns et en fait un chignon. elle se regarde de nouveau et est satisfaite de l'image que le miroir renvoie. plus satisfaite que si elle devait porter un haïk. elle se souvient des femmes, discrètes dans leurs habits blancs, au marché. les femmes qui sentent les épices nouvelles importées d'asie ou bien d'europe, et les anciennes aussi. les femmes grondant leurs enfants à voix basse, les serrant un peu plus fort contre leur hanche qu'on ne distingue pas au travers de ses draps. des larmes lui viennent aux yeux mais elle ne pleure pas, parce qu'elle ne doit pas. elle n'a pas pleuré depuis longtemps déjà. elle se brosse les dents, et se frappe mentalement pour avoir mis son rouge-à-lèvres avant. tout le temps, elle le fait tout le temps. elle sort de la salle de bain, vérifie que ses sœurs et son frère sont bien levés. elle porte déjà son masque de mensonges, ainsi que ses chaussures nike bien trop chères. elle porte aussi mélancolie et honte, qui pèsent lourd sur son âme d'enfant d'avant, d'enfant restée à alger, au temps où elle savait aimer.

bref.
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